mercredi 17 février 2016

Une chambre à soi de Virginia Woolf

Résumé

Bravant les conventions avec une irritation voilée d'ironie, Virginia Woolf rappelle dans ce délicieux pamphlet comment, jusqu'à une époque toute récente, les femmes étaient savamment placées sous la dépendance spirituelle et économique des hommes et, nécessairement, réduites au silence. Il manquait à celles qui étaient douées pour affirmer leur génie de quoi vivre, du temps et une chambre à soi.

Publié aux Éditions 10/18 en 1992.







Ce que j'en pense

Virginia Woolf est une femme qui m'a toujours fascinée. Malgré la déception que j'ai eu en lisant Mrs Dalloway, je n'ai jamais pensé que cette femme ne méritait pas qu'on la lise. C'est pourquoi quand j'ai vu ce livre à la librairie, je l'ai pris sans me poser de questions. 

Une chambre à soi est un essai sur la place des femmes dans la vie en générale, mais surtout dans la littérature. N'importe qui s'intéressant à cette question sait que le sujet est délicat et qu'au final, les femmes ont été affreusement limitées dans leur développement littéraire. Ainsi, on suit l'auteure à travers son sujet d'étude: quel est le lien entre les femmes et le roman ? Virginia Woolf aborde le sujet d'une façon très pertinente en faisant plusieurs liens avec d'importants écrivains comme Shakespeare, Jane Austen, les soeurs Brontë et George Sand. Elle explique à quel point il était mal vu pour une femme de vouloir écrire, d'avoir une pratique intellectuelle. Heureusement, certaines femmes ont réussi à braver ses conventions et à représenter la Femme. 

« Le monde ne leur disait pas ce qu'il disait aux hommes : Écrivez si vous le voulez, je m'en moque... Le monde leur disait avec un éclat de rire: Écrire ? Pourquoi écririez-vous ? »

Le livre est divisé en six chapitres. Les deux premiers, je les ai trouvés assez long. Je trouvais que Virginia Woolf contournait le sujet, qu'elle s'en approchait sans entrer directement dedans. Par la suite, elle s'intéresse concrètement aux écrivaines mentionnées plus haut et ça m'a totalement accroché. Elle parle du parcours de Jane Austen qui doit s'occuper de la maison, des tâches ménagères, des enfants, de son mari. En gros, elle n'a aucun temps pour elle. C'était semblable pour la grande majorité des femmes à cette époque. Jane Austen a toutefois persisté à écrire, même si elle le faisait dans le secret, et c'est grâce à elle que nous avons Orgueil et Préjugés

« Et sans vanterie ou désirer de peiner l'autre sexe, on peut dire qu'Orgueil et Préjugés est un bon roman. Quoi qu'il en soit, il n'y avait pas lieu de rougir parce que l'on était prise en flagrant délit d'écrire Orgueil et Préjugés. Jane Austen, cependant, était contente d'entendre grincer les gonds, ce qui lui permettait de cacher son manuscrit avant que quelqu'un entrât. Pour Jane Austen, il y avait quelque de peu honorable dans le fait d'écrire Orgueil et Préjugés. Et, me demandai-je, Orgueil et Préjugés aurait-il été un meilleur roman, si Jane Austen n'avait pas pensé qu'il était nécessaire de cacher son manuscrit aux visiteurs ? »

L'ironie, dans toute cette histoire, est à quel point les hommes sont obnubilés par les femmes. Ils écrivent à propos elles, ils parlent d'elles, ils les aiment, ils vivent avec elles. Et pourtant, elles n'ont pas le droit de participer à la vie publique et surtout pas d'écrire. Pourquoi ? Si elles sont si importantes au développement des hommes, pourquoi ne peuvent-elles pas être leur égal ? C'est frustrant, car on le sait bien, aujourd'hui, qu'un homme comme une femme est capable d'écrire un roman. 

À un moment, Virginia Woolf imagine ce qui se serait passé si Shakespeare avait eu une sœur dotée des mêmes capacités que lui. Elle ne prend pas beaucoup de temps avant d'arriver à la fatidique conclusion que cette sœur aurait préféré mourir plutôt que d'être emprisonnée dans ce corps de femme sans aucune possibilité de créer quoique ce soit. C'est triste, fâchant, révoltant, mais pourtant si vrai. 

« Elles écrivaient comme écrivent les femmes et non comme écrivent les hommes. Parmi les mille femmes qui alors écrivaient des romans, elles furent les seules à ignorer complètement les perpétuels conseils de l'éternel pédagogue: écrivez ceci, pensez cela. Elles seules furent sourdes à l'éternelle voix, tantôt grommelante, tantôt protectrice, tantôt autoritaire, tantôt chagrine, tantôt scandalisée, tantôt irritée, tantôt paternelle, à cette voix, qui ne peut laisser les femmes en paix[...]. »

L'écriture de Woolf est très bien structuré. J'avais peur, en lisant un essai, d'avoir du mal à suivre, de me perdre, mais j'ai réussi à bien comprendre. Il est vrai que ce livre me demandait un peu plus de concentration qu'à l'habitude. Je ne voulais pas lire avec plein de gens autour: j'avais besoin de calme et de silence afin de bien assimiler les avancements dans la pensée de l'essayiste. 


Bref, je pense que cet essai est important. Le message qu'il véhicule est important : laissez la femme être, permettez lui d'avoir une chambre à soi et enfin, peut-être, arrivera-t-elle à s'épanouir. 

★★★★☆

2 commentaires:

  1. Je le laisse donc dans ma Wish List :) Merci pour cette belle critique qui donne très vite !

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  2. Cela a l'air vraiment intéressant ! Je le lirai :)

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